A la suite des atteintes graves et répétées portées, ces derniers jours, et dans de nombreux points du territoire national, à l’encontre de la sécurité des citoyens et de la paix civile, M. Mohamed Boudiaf, président du Haut Comité d’État, après avoir réuni le Haut Conseil de sécurité et consulté le chef du gouvernement et le président du Conseil constitutionnel, a signé ce jour dimanche 5 chaâbane 1412 correspondant au 9 février 1992, un décret portant instauration de l’état d'urgence.
Ce décret entre en application ce jour, 5 chaâbane 1412 correspondant au 9 février 1992, à 20 heures. Voici le texte de ce décret.
Article 1 – L’état d’urgence est proclamé à compter du 5 chaâbane 1412 correspondant au 9 février 1992 pour une durée de 12 mois sur l’ensemble du territoire national. Il peut être néanmoins levé avant cette date.
Article 2 – L’état d’urgence vise à sauvegarder la restauration de l’ordre public, la sécurité des personnes et des biens ainsi que le fonctionnement normal des services publics.
Article 3 - Le gouvernement prend toutes les mesures réglementaires découlant de ses prérogatives en vue de répondre à l’objectif pour lequel a été proclamé l’état d'urgence.
Article 4 - Le ministre de l'Intérieur, sur l'ensemble ou une partie du territoire national et le wali, dans les limites régionales de la wilaya, sont habilites à prendre les mesures nécessaires pour sauvegarder l’ordre public par le biais de décisions conformément aux dispositions suivantes et dans le cadre du respect des orientations gouvernementales.
Article 5 - Le ministre de l'Intérieur peut ordonner l’internement de toute personne dont l'activité se révèle dangereuse pour l’ordre et la sécurité publics et le fonctionnement des services publics dans un centre de sûreté établi dans un lieu précis. Ces centres de sûreté sont créés par décret du ministre de l'Intérieur.
Article 6 - La proclamation de l’état d'urgence en vigueur investit au ministre de l’Intérleur, sur l'ensemble du territoire, et aux walis, dans sa wilaya, dans le cadre du respect des orientations gouvernementales, les pouvoirs suivants.
1. Restreindre ou interdire la circulation des personnes et des véhicules dans des endroits et à des moments précis.
2. Réglementer la circulation et la distribution des denrées alimentaires et de services de première nécessité.
3. Instituer des zones de séjour réglementé pour les non-résidents.
4. Interdire de séjour ou mettre en résidence surveillée toute personne majeure dont les activités se révèlent nuisibles pour l’ordre pubric et le fonctionnement normal des services publics.
5. Prononcer des réquisitions de personnels pour accomplir à leur poste de travail leurs activités professionnelles habituelles dans le cas d'une grève non autorisée ou illégale. Cette mesure concerne les entreprises publiques et privées en vue d'assurer les services d'intérêt public.
6. Opérer exceptionnellement des perquisitions de jour comme de nuit.
Article 7 - Le ministre de l’'Intérieur et le wali compétent territorialement sont investis, par voie d'arrêté, du pouvoir d'ordonner la fermeture provisoire de salles de spectacles et de lieux de réunions, quelle que soit leur nature, et d'interdire toute manifestation jugée de nature à troubler l’ordre et la quiétude publics.
Article 8 - Lorsque l'action légale des autorités publiques est mise en échec ou entravée par des actitudes d'obstruction avérée ou d'opposition déclarée de la part d'assemblées locales ou d'instances exécutives communales, le gouvernement prononce, en cas de besoin, les mesures de leur suspension ou de leur dissolution.
Dans ce cas, l'autorité de tutelle procède à la désignation de délégations exécutives au niveau des collectivités territoriales concernées jusqu'à leur pourvoi par voie électorale.
Article 9 - Le ministre de l’Intérieur peut, par délégation, transférer à l'autorité militaire la direction des opérations de rétablissement de l’ordre au niveau local ou au niveau de certaines circonscriptions territoriales.
Article 10 - Les tribunaux militaires peuvent être saisis de la connaissance de crimes et délits graves commis contre la sûreté de l’État quelle que soit la qualité de ses incitateurs, auteurs ou complices.
Article 11 - Sans préjudice aux dispositions de l'article 8 suscité, les mesures et restrictions introduites par le présent décret seront levées dès que prend fin l’état d'urgence, à l’exception des poursuitres engagées devant les juridictions.
Article 12 - Le présent décret sera publié au Journal officiel de la République algérienne démocratique et populaire.